Introduction

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L’année 2012, en matière de non-prolifération et de désarmement, s’est inscrite dans la continuité des précédentes, sans grande surprise, tant les situations régionales sont bloquées. Aux perspectives improbables succèdent déception de la communauté internationale et statu quo.

C’est ainsi que depuis l’Accord de Paris de novembre 2004, la crise iranienne, si on peut encore utiliser le terme de crise après plus de dix ans d’impasse, n’en finit pas de rebondir, démontrant à l’envi la volonté de Téhéran de ne pas négocier et de poursuivre l’enrichissement de l’uranium. Pour l’heure, les « P 5+1 » sont dans l’attente d’une relance du processus de négociation, après avoir proposé sans succès depuis décembre des dates et lieux de réunion. L’Iran de son côté cherche à gagner du temps, après avoir refusé le rendez-vous d’Istanbul des 28 et 29 janvier 2013. Les perspectives de dénouement de ce dossier sont à l’évidence extrêmement éloignées. Avec la Corée du Nord, les pourparlers à six menés sous la conduite de la Chine sont dans l’impasse depuis 2009. On pouvait s’interroger sur l’évolution du régime après l’arrivée au pouvoir suprême du jeune Kim Jong-un et espérer un retour à la table des négociations. Il n’en a rien été. Non seulement l’héritier de la dynastie des Kim semble décidé à maintenir son pays dans l’isolement et à lui conserver son statut d’Etat nucléaire de facto, mais, tout en laissant suggérer l’éventualité d’un troisième essai nucléaire, il a poursuivi cette année le développement de ses capacités balistiques, à travers deux lancements d’une fusée Unha 3 emportant un petit satellite : le premier, en avril, s’est soldé par un échec, rattrapé par le succès du second en décembre. Ces tirs d’un lanceur qui est proche du Taepodong-2 et qui a de nombreuses caractéristiques d’un missile balistique à longue portée interviennent en violation des trois résolutions 1 695, 1 718 et 1874 prises par le Conseil de sécurité en réaction aux essais nucléaires et balistiques effectués par Pyongyang en 2006 et 2009. D’autres mesures de sanctions pourraient être décidées si la Chine n’y fait pas obstacle.

La troisième région très sensible du globe en matière de prolifération reste le Moyen-Orient dans son ensemble, où le projet d’établissement d’une zone exempte d’armes de destruction massive, relancé en 2010 puis inauguré à la Conférence d’Helsinki en octobre 2011, n’a guère avancé, voire a régressé, malgré les efforts de l’Union européenne en 2011 et 2012 et du facilitateur finlandais, l’ambassadeur Laajava. La conférence prévue en 2012 pour promouvoir le processus et le rendre effectif n’a pas pu se tenir et a été ajournée sine die. Les obstacles à cette initiative ambitieuse sont nombreux et les lever demandera du temps et passera par l’établissement de mesures de transparence et de confiance de la part de tous les acteurs de la région.

Cette rubrique présente cette année deux articles. Le premier traite des perspectives du désarmement nucléaire quatre ans après le « Discours de Prague » du président Barack Obama. La perspective d’un monde sans armes nucléaires appelée par le Président américain avait suscité un engouement chez certains pays non nucléaires, mais n’a guère duré à l’épreuve des réalités de la prolifération nucléaire dans le monde. L’auteur brosse à cet égard un tableau précis et exhaustif de l’état de la planète en matière de capacités nucléaires militaires et des négociations multilatérales ou bilatérales dans ce domaine : arrêt du processus américano-russe depuis la ratification en 2011 du Traité Nouveau START, lié entre autres aux différends sur la défense antimissiles, blocage de la Conférence du désarmement et de l’entrée en vigueur du TICE, persistance des crises iraniennes et nord-coréenne, absence d’avancée au Moyen-Orient dans son ensemble. Si l’initiative Global Zero continue d’exister, elle se heurte aux problématiques précitées et le renforcement du régime global de non-prolifération reste, comme le rappelle l’auteur, la priorité.

Le second article est consacré au contrôle des armes classiques, plus spécifiquement à une analyse approfondie des problématiques et de l’histoire du Traité sur le commerce des armes (TCA). Le principe d’un tel instrument est inscrit dans les objectifs de la Société des Nations puis dans l’article 26 de la Charte des Nations Unies et dans le Registre sur les armes classiques créé en 1992. Dès le début de l’après-Guerre froide, il s’impose comme une priorité et suscite la mobilisation d’une grande diversité d’acteurs avec, comme le décrit l’auteur, des succès divers, tant la portée et le contenu du Traité sont difficiles à définir. La résolution 64/48 adoptée en 2009 par l’Assemblée générale des Nations Unies met en place un processus décisif, aboutissant à une conférence de négociation tenue en juillet 2012. Si elle a débouché sur un projet de traité, cette conférence est un échec, dont l’auteur propose une analyse détaillée des circonstances et des raisons et dépeint les incertitudes pour l’avenir. Il offre une analyse du texte du Traité qui en fait clairement ressortir les ambiguïtés. Quoi qu’il en soit, une nouvelle conférence de négociation se tiendra en mars 2013, où les mêmes difficultés ne manqueront pas de resurgir.