La situation géographique de la Turquie, sa formidable croissance économique et sa stabilité politique sont les principaux arguments plaidant en faveur d’une reconnaissance de ses aspirations d’acteur mondial. La très active diplomatie turque est marquée par une certaine mise à l’écart du droit international, rendant délicate la présentation des contours de la politique juridique extérieure turque. Alors que le discours turc de politique extérieure fait du multilatéralisme un instrument privilégié, l’action concrète du pouvoir d’Ankara est très nettement guidée par les formes bilatérales d’expression du droit international. La Turquie symbolise ainsi le rapport que beaucoup de puissances émergentes peuvent entretenir avec les instruments du droit international : ces acteurs des relations internationales plaident pour une réforme de l’ordre international, mais, contrairement aux anciennes dépendances coloniales qui avaient placé le droit international multilatéral au cœur de leurs revendications, voient dans le recours au bilatéralisme un moyen plus efficace d’affirmation de leur poids. Cela est particulièrement significatif dans le champ du droit international économique, où la Turquie peut pleinement exprimer sa puissance relative. Dans de nombreux domaines en revanche, ne pouvant prétendre avancer seule, la Turquie se plie au cadre multilatéral en tentant d’obtenir une place spécifique en son sein. Ce multilatéralisme « contraint » s’exprime de la manière la plus nette dans les relations qu’Ankara entretient avec le système de sécurité collective.