– Résumé Aujourd’hui encore, malgré le phénomène de la mondialisation des échanges commerciaux, nombre de biens et technologies ne sont pas librement exportables par les industriels des pays occidentaux. En effet, pour des raisons liées à la sécurité, les États fournisseurs de technologies sensibles continuent à soumettre une partie de leurs exportations à des procédures de contrôle. Celles-ci portent sur deux catégories de biens distinctes, à savoir, d’une part les matériels de guerre, et d’autre part les produits et technologies « à double usage », c’est-à-dire dont les applications et utilisations concernent aussi bien les domaines civils que militaires. Ces contrôles ne sont pas une nouveauté. Ils ont été élaborés durant la guerre froide pour répondre à des finalités spécifiques. D’une part, il s’agissait de minimiser la menace militaire que représentait l’URSS et ses alliés pour les pays membres de l’Alliance atlantique. D’autre part, les États fournisseurs ont souhaité utiliser les contrôles pour lutter contre la prolifération des armes dites de destruction massive (armes nucléaires, biologiques et chimiques) et des vecteurs capables de les emporter par des pays en voie de développement. Dans la recherche d’une meilleure efficacité, les États fournisseurs ont coordonné leurs efforts au niveau international grâce à des structures appelées « régimes multilatéraux de contrôle ». Leur persistance peut être perçue selon deux points de vue. D’un côté, on peut arguer que les régimes multilatéraux continuent d’exister car ils sont des instruments efficaces face à une menace potentielle venue de pays cherchant à devenir des puissances régionales hostiles. Ils seraient donc un moyen de garantir la sécurité nationale des États fournisseurs. D’un autre côté, la pérennité des mesures de contrôles des flux technologiques peut être analysée comme un moyen de lutter contre un phénomène particulier qui ne vise pas des pays spécifiques. En ce sens, les groupes formés par des pays fournisseurs de technologies sensibles serviraient à lutter contre la prolifération des armes de destruction massive et les risques que cette dernière fait courir à la sécurité internationale. Ici, c’est la prolifération qui constitue la menace et non pas des États déterminés. Dans le cas où un pays proliférant déciderait d’abandonner son programme d’armes de destruction massive, il ne subira plus les mesures de contrôles des pays fournisseurs. Telle est la situation de l’Afrique du Sud, qui de proliférant est passée au stade de champion de la non prolifération nucléaire et est devenue membre de différents régimes. Les régimes multilatéraux permettent une certaine discipline collective pour les exportations. Les mesures de restriction n’y sont adoptées qu’à la condition de respecter trois critères. D’abord, l’acquisition et/ou le développement de biens et technologies militaires ou à double usage par certains utilisateurs finaux doit constituer une menace militaire potentielle pour les intérêts communs des pays membres. Ensuite, les contrôles multilatéraux d’exportation doivent être un moyen efficace de limitation de cette menace. Enfin, les contrôles à l’exportation ne doivent pas interférer avec les utilisations commerciales légitimes de biens à double usage aussi longtemps que la sécurité des États fournisseurs n’est pas remise en cause. Ces régimes sont donc des instruments mettant en place des politiques convergeantes en matière de transferts de technologies. Ils couvrent différents domaines technologiques, avec des principes, des normes et des règles de fonctionnement particuliers. Tous ceci pose la question de l’articulation des relations entre les États parties au sein de ces régimes, ainsi que celle des rapports entre ces derniers et les pays tiers. En effet, les États non fournisseurs de technologies souhaitent que les discussions sur l’utilisation pacifique et le contrôle des transferts soient réalisées dans un cadre différent, celui de régimes conventionnels internationaux. – Le sommaire de l’AFRI 2000