Introduction. Désarmement, maîtrise des armements, non-prolifération.

Partager sur :

Pour la non-prolifération et le désarmement, l’actualité de l’année 2006 n’incite guère plus à l’optimisme que celle des trois précédentes, en ce qu’elle marque peu d’évolutions positives et que, en particulier, le régime de non-prolifération nucléaire continue de subir les mêmes revers, essentiellement au Moyen-Orient et en Asie. L’Iran, en effet, poursuit sa stratégie de prolifération opaque et de con- quête de l’hégémonie régionale. La résolution 1696 adoptée par le Conseil de sécurité le 31 juillet 2006 rappelle quelques constats qui dépeignent une réalité accablante: l’Iran a violé substantiellement ses engagements au titre de ses accords de garanties avec l’AIEA et n’a pas pris les mesures nécessaires et utiles pour restaurer la confiance de la communauté internationale; après plus de trois ans d’efforts, l’AIEA n’est pas en mesure de conclure qu’il n’y a pas de matières ou d’activités nucléaires non déclarées en Iran et n’est pas non plus en mesure de conclure que l’Iran n’a pas d’activités nucléaires militaires. Après les avoir suspendues un temps, l’Iran a décidé de reprendre et d’intensifier ses activités d’enrichissement de l’uranium et de restreindre sa coopération avec l’Agence, à laquelle il est pourtant tenu, comme tout Etat-partie au TNP, en vertu du Protocole additionnel qu’il a signé en décembre 2003 et qu’il s’était engagé à appliquer avant même sa ratification. Le Conseil de sécurité est parvenu, fin décembre et non sans mal, à voter une résolution décidant de sanctions non militaires progressives, mais l’Iran n’en a cure et, après avoir mis en service l’usine de production d’eau lourde d’Arak, a affiché son intention de porter à trois mille cen- trifugeuses sa capacité d’enrichissement en uranium et a cessé toute coopération effective avec l’AIEA. Il s’agit là d’un défi historique à la norme globale de non-prolifération, et du scénario de non-respect (non-compliance) le plus grave que le régime ait connu: qu’adviendra-t-il à terme du Traité de non-prolifération? Le moment est également venu de s’interroger sur le «troisième pilier» du TNP, qui traite de la promotion des applications pacifiques de l’énergie nucléaire. Comme le souligne très opportunément Tiphaine de Champ- chesnel dans son article, le droit imprescriptible des Etats non dotés d’armes nucléaires à ces applications est conditionné par leur respect des engagements de non-prolifération et il importe de s’en assurer par des dispositifs appropriés, à l’intérieur comme à l’extérieur du régime du TNP. Les solutions futures susceptibles de contribuer en particulier à sortir de la crise iranienne devront satisfaire à tout prix cet impératif. En Asie, la Corée du Nord poursuit une politique qu’il faut bien qualifier de sanctuarisation agressive, avec l’interruption, de son fait, des Pourparlers à six depuis l’accord de septembre 2005 et la conduite d’un essai nucléaire en octobre 2006. On a beaucoup dit et écrit à propos de cet essai de faible énergie. Il est extrêmement vraisemblable qu’il est effectivement de nature nucléaire et qu’il constitue un échec technique, ce qui permet de conjecturer que le développement et la militarisation de l’arsenal nucléaire nord-coréen en sont encore à un stade assez préliminaire. Cependant, le régime de Pyongyang, de par sa nature et du fait de son évidente détermination, n’en constitue pas moins une menace importante pour ses voisins et pour la stabilité de la région et il convient d’espérer que la poursuite d’une action diplomatique résolue suffira pour parvenir à un accord de désarmement nucléaire de la Corée du Nord internationalement vérifié. Cependant, les mécomptes du régime de non-prolifération ne font pas obstacle à la poursuite et au dynamisme de la réflexion conceptuelle et notre rubrique cette année veut en rendre compte. Dans le contexte des nouvelles menaces, au premier plan desquelles le terrorisme, le trafic mondial du fret en conteneurs présente une vulnérabilité (presque) oubliée. On propose ici une nouvelle approche de cela, basée sur l’idée d’un code de conduite, qui va largement au-delà de l’approche unilatérale que constitue la CSI (Initiative de sécurité sur les conteneurs) américaine. Tirant les leçons de l’échec en 2001 du Protocole de vérification de la Convention d’interdiction des armes biologiques, Paul Dahan propose une large réflexion sur une problématique centrale de l’arms control, qui est celle de la vérification: il est possible de satisfaire au double impératif de légitimité et d’efficacité en imaginant de nouvelles modalités de contrôle, plus diversifiées mais non moins dissuasives, pour les instruments internationaux multilatéraux à venir (tels que le Cut-Off) comme pour certains régimes récents (résolution 1540 du Conseil de sécurité, Proliferation Security Initiative, etc.). Le désarmement régional «géographique» trouve parfois des modes originaux de mise en œuvre. Matthieu Chillaud offre une très intéressante analyse de l’exemple historique de la démilitarisation et de la neutralisation des îles Aland, qui ont été un enjeu stratégique pour la Russie, la Suède et la Finlande.

Le sommaire de l’AFRI 2007