La rivalité russo-américaine a fréquemment été présentée comme la principale source d’escalade du conflit russo-géorgien d’août 2008. La Géorgie constituerait un des théâtres stratégiques de « la nouvelle guerre froide » entre le Kremlin et la Maison-Blanche. Si une logique de blocs, opposant la puissance russe à l’influence américaine, est apparue dans le Caucase du Sud, elle ne peut à elle seule offrir une grille de lecture pertinente du conflit. A l’état des relations entre Moscou et Washington doivent en effet être associées les réalités politiques locales : celles d’un antagonisme croissant entre un pouvoir central géorgien décidé à restaurer son autorité sur l’ensemble du territoire et un Etat de fait ossète déterminé à préserver son indépendance vis-à-vis de Tbilissi. En outre, la configuration bipolaire russo-américaine ne rend pas compte, au-delà du rôle joué par l’Union européenne, du différentiel d’intérêt et de puissance entre la Russie et les Etats-Unis dans la région. La médiation diplomatique et l’assistance économique fournie par l’Occident à la Géorgie sont sans commune mesure avec la vigueur du soutien militaire et politique apportée par le Kremlin à l’Ossétie du Sud. En dépit des discours, la Géorgie a faiblement pesé sur l’équilibre plus général des rapports de force entre la Russie et les Etats-Unis dans le Caucase du Sud.