Introduction
I. – Le contexte de la résolution 687
A. – Résolution 678 et résolution 687: de l’action indirecte à l’intervention directe [B. – La résolution 687 et l’action d’ensemble du Conseil de sécurité dans l’affaire du Golfe->#b] C. – La singularité de la résolution 687
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La résolution 687, adoptée le 3 avril 1991 par le Conseil de sécurité, est un véritable monument juridique. Elle a pour objet de mettre fin au conflit international résultant de l’occupation et de l’annexion du Koweit, Etat membre des Nations Unies, par l’Iraq, autre Etat membre. Elle tend au rétablissement et à l’organisation durable de la paix entre les deux Etats, et plus largement, dans la région. Mais elle concentre ses foudres sur l’Iraq, responsable de la situation créée et qui doit en supporter les lourdes conséquences. Même si son acceptation et sa coopération sont requises, il se voit soumis à un régime juridique d’exception, imposé, contraignant et unilatéralement défini. La résolution joue cependant sur un ensemble de registres variés, celui des invitations, celui des exigences, celui des mesures coercitives. Elle utilise diverses techniques institutionnelles, le recours au Secrétaire général, la constitution d’organes subsidiaires, le concours d’institutions spécialisées. Elle emprunte le chemin de l’optatif, de la normativité, de l’institutionnel, de l’opérationnel. Cette construction, dense et complexe à la fois, a été établie en quelques jours après la fin des combats en Iraq et au Koweit, il est vrai après plusieurs mois de latence puis un conflit auquel les Nations Unies en tant que telles sont demeurées extérieures [[ Sur les aspects juridiques du conflit, on pourra consulter notamment : les aspects juridiques de la crise et de la guerre du Golfe, sous la direction de B. STERN, Cedin, Montchrestien, 1991 ; J. VERHOEVEN: « Etats alliés ou Nations Unies ? L’ONU face au conflit entre l’Iraq et le Koweit », A.F.D.I. 1990, p. 145-194; Ph. BRETTON : « Remarques sur le jus in bello dans la Guerre du Golfe », ibid, 1991, infra.]]. Le résultat est impressionnant et témoigne de l’ambition nouvelle qui est celle du Conseil, ainsi que de l’ampleur des capacités dont il dispose dans le cadre des missions qui lui sont confiées par la Charte. La résolution 687 comprend un Préambule de 26 alinéas et un dispositif de 34 § répartis en 9 sections (A à 1). Le Préambule comporte une série d’éléments et de références situant le texte dans la perspective d’ensemble de l’action des Nations Unies dans l’affaire comme dans les développements à plus long terme pour la région. Les différents points du dispositif sont d’importance et de dimension variées. Le premier (A, § 2 à 4) traite de la question de la frontière entre l’Iraq et le Koweït; le deuxième (B, § 5 et 6) établit une zone démilitarisée des deux côtés de cette frontière, et organise dans cette zone une opération de maintien de la paix (MONUIK) ; le troisième, qui constitue le coeur du dispositif (C, § 7 à 14) et qui appelle les développements opérationnels et institutionnels les plus amples, traite des mesures de désarmement imposées à l’Iraq et des mécanismes internationaux destinés à les mettre en œuvre ; le point D (§15 unique) prévoit la restitution des biens koweïtiens saisis par l’Iraq, et le point E (§ 16 à 19) s’attache aux questions de responsabilité et aux modalités d’indemnisation des dommages provoqués par l’action de l’Iraq ; le sixième point (F, § 20 à 29) examine le sort des mesures coercitives précédemment décidées à l’encontre de l’Iraq, tendant à obtenir l’évacuation pacifique du Koweït, et sur le maintien desquelles on pouvait s’interroger ; le point G (§ 30 et 31) organise le rapatriement des koweïtiens et autres résidents au moment de l’occupation par l’Iraq, avec le concours du C.I.C.R. ; le huitième point (H, § 32 unique) exige de l’Iraq qu’il s’engage à ne se livrer ni à faciliter ou encourager des actes de terrorisme. Il apparaît à cet égard comme un sous-produit, voire un repentir du point C sur les mesures de désarmement. Le dernier point (I, § 33 et 34) déclare qu’un cessez-le-feu entrera en vigueur entre l’Iraq et les pays ayant participé à la coalition militaire sous commandement américain (« Etats membres coopérant avec le Koweit… ») [[Suivant la formule généralement utilisée par les résolutions pertinentes, et notamment le préambule de la résolution 687.]] dès que l’Iraq aura notifié officiellement son acceptation des dispositions qui précèdent. Il ajoute que le Conseil de sécurité demeure saisi de la question pour assurer l’application de la résolution et garantir la paix et la sécurité de la région [[Cette résolution a été précédée par la résolution 686, adoptée le 2 mars, prenant note des lettres du Ministre des affaires étrangères de l’Iraq acceptant l’ensemble des résolutions précédentes, ainsi que de la suspension des combats offensifs menés par la coalition. Elle fixe les conditions d’un arrêt des hostilités, du retour des prisonniers de guerre et autres personnes détenues ou retenues, et amorce certaines dispositions de fond de la présente résolution, spécialement en matière de responsabilité internationale de l’Iraq (§ 2 b et d).]]. Pour compréhensive qu’elle soit, cette résolution ne traite pas des violations du droit humanitaire intervenues avant ou pendant le conflit, pas davantage qu’elle n’évoque la situation des populations kurdes d’Iraq qui faisaient déjà l’objet d’une répression. Une résolution spéciale 688 (5 avril 1991) a été adoptée sur le sujet, non sur la base d’un « droit d’ingérence humanitaire » délicat à formuler, mais dans le contexte du maintien de la paix et de la sécurité de la région, c’est-à-dire dans le cadre dé la mission générale du Conseil [[La résolution 688, de façon tout à fait symbolique, ne figure pas dans le Recueil des actes du Conseil publié par les Nations Unies et relatives à la situation entre l’Iraq et le Koweit (DPI/1104/Rev.2-40446-Mai 1991). Elle ne se réfère nullement à une quelconque ingérence humanitaire, mais aux exigences du maintien de la paix et de la sécurité. U Conseil rappelle dans le préambule l’article 2 § 7 de la Charte, mais condamne la répression des populations civiles de l’Iraq dans différentes parties du pays, « dont les conséquences menacent la paix et la sécurité de la région » (§ 1). Il ne se réfère toutefois pas au Chapitre VII de la Charte.]]. La résolution 687 a été adoptée par douze voix, y compris les votes positifs des cinq membres permanents, une voix contre, celle de Cuba, et deux abstentions (Equateur et Yémen). Le Koweit et l’Iraq ont participé sans droit de vote à la réunion et leurs représentants ont pris la parole. Le délégué du Koweit ne s’est pas attardé sur les différents points spécifiques mais a marqué l’importance historique du texte, en reprenant la comparaison précédemment faite par le Secrétaire d’Etat des Etats-Unis, M. James Baker III, avec l’absence de réactions de la SdN lors du conflit entre l’Italie et l’Éthiopie, comparaison flatteuse pour l’ONU et encourageante pour son avenir [[Procès-verbal provisoire de la 2981ème séance du Conseil de sécurité, SIPV 2981, p. 10-11.]]. Le représentant Iraqien s’est également longuement exprimé avant le vote. Il a d’abord développé une argumentation déjà présentée, critiquant la résolution 678 (29 novembre 1990), base de l’action militaire de la coalition puisque autorisant implicitement le recours à la force contre l’Iraq [[Cette résolution, volontairement formulée de façon elliptique « autorise les Etats membres coopérant avec le Koweit à utiliser tous les moyens nécessaires » pour appliquer la résolution 660, à défaut de son exécution par l’Iraq avant le 16 janvier 1991.]]. Il a estimé que cette résolution était contraire à la Charte parce qu’outrepassant ses termes et ne correspondant notamment pas aux modalités d’action militaire prévues par son article 42. Il a au surplus affirmé que la conduite des opérations avait en fait dépassé les objectifs de cette résolution, en raison de l’ampleur des pertes et des dommages subis par l’Iraq. Sur la résolution 687 elle-même, il a contesté la compétence du Conseil pour procéder autoritairement à une détermination de la frontière entre l’Iraq et le Koweit; il a déclaré que l’Iraq était également en droit d’obtenir des réparations pour les dommages qui lui avaient été infligés; il a déploré que seul l’Iraq se voie imposer de détruire des armements et demandé que l’on s’intéresse également à l’armement nucléaire israélien; il a critiqué le maintien des mesures coercitives de caractère économique, comportant embargo et blocus, dès lors que l’Iraq avait accepté l’ensemble des résolutions que ces mesures avaient pour objet de conforter; il a voulu y voir une véritable agression économique. Il s’est ainsi posé en victime, dénonçant le caractère illégal, discriminatoire et injuste de l’ensemble de l’action des Nations Unies [[Procès-verbal, ibid., p. 21-35.]]. L’Iraq n’en a pas moins rapidement accepté la résolution [[Lettres du 6 avril 1991 adressées par le Ministre des affaires étrangères de l’Iraq au Président du Conseil de sécurité et au Secrétaire général (S/22456). Le Gouvernement du Koweit a présenté une acceptation similaire (S/22457).]] comme il lui était demandé, et un cessez-le-feu a été conclu sur cette base entre les belligérants [[Pas davantage que pour le recours à la force et la conduite des hostilités, les Nations Unies n’ont été associées à la signature du cessez-le-feu, intervenu entre les seuls participants aux combats.]]. Soutenant les critiques de l’Iraq, le représentant de Cuba a repris son argumentation à propos de la frontière, critiqué le caractère sélectif et en fait discriminatoire de l’action du Conseil, rejeté le maintien des « sanctions » économiques qui affectent non seulement le pays visé mais aussi les tiers [[ On sait qu’une disposition de la Charte, l’article 50, prévoit que tout Etat, membre ou non de l’Organisation, peut consulter le Conseil pour résoudre les difficultés économiques qu’entraîne pour lui l’application des mesures prises par le Conseil. Des demandes d’assistance ont été présentées sur cette base et le Conseil a chargé le Comité établi par la résolution 661 de les examiner (résolution 669 du 25 septembre 1990).]], contesté également qu’il appartienne au Conseil de décider des mesures d’indemnisation en rappelant à cet égard la compétence de la Cour internationale de justice. La résolution soulève à son avis un problème de répartition de compétences qu’il appartiendrait à l’Assemblée générale de résoudre. Il a conclu que Cuba ne voterait pas ce texte « curieux » [[Procès-verbal, préc. p. 71.]]. Le représentant du Yémen a également estimé injustes et sévères les mesures adoptées, notamment en ce qui concerne la frontière, la destruction d’armements, les dommages de guerre et le maintien de l’embargo. Il a soutenu que sur divers points la résolution excédait les compétences du Conseil et qu’il aurait convenu de saisir la Cour internationale – mais sans indiquer le cadre, consultatif ou contentieux, de cette saisine. Il s’est aussi interrogé sur l’opportunité des mesures et sur leur aptitude à rétablir et à maintenir la paix dans la région. Insistant sur les droits du peuple iraqien, victime des mesures prises et implicitement distingué de ses dirigeants, il a appelé à une solution pacifique entre l’Iraq et le Koweit pour régler ce conflit régional [[ Ibidem, p. 36-50.]]. Intervenant après le vote, le délégué de l’Équateur a adopté une attitude d’ensemble nettement plus positive. Les mesures prises sont à son avis «généralement constructives » et répondent à une -réalité objective dans la région » [[ Ibidem, p. 107.]]. Il a cependant contesté les modalités adoptées par le Conseil pour la détermination et la délimitation de la frontière entre l’Iraq et le Koweit en estimant que la Cour internationale aurait dû être saisie sur ce point. Il a regretté qu’il n’ait pas été possible de voter séparément sur les paragraphes pertinents, dont l’Équateur se serait dissocié. Son abstention est donc exclusivement motivée par ce désaccord partiel. Les autres intervenants, y compris les cinq membres permanents, s’exprimant avant ou après le vote, ont en revanche soutenu la résolution, et ont répondu à divers aspects de l’argumentation iraqienne. On reviendra analytiquement sur ces divers points. Avant toutefois de reprendre les principaux éléments du dispositif relatifs au rétablissement et au maintien de la paix (II), puis à d’indiquer les problèmes et les difficultés d’application de la résolution 687 (III), il est nécessaire de la situer dans le contexte de l’action d’ensemble des Nations Unies dans cette affaire (I).
I – le contexte de la résolution 687
Le Conseil a adopté en relation avec la crise du Golfe un ensemble de résolutions destinées à mettre fin à l’occupation et à l’annexion du Koweit qui ont autorisé et canalisé une pression croissante à l’encontre de l’Iraq. Certes, le Conseil n’a pas formellement employé le terme d’agression, quoiqu’il se soit référé à la légitime défense et à l’article 51 [[ La référence à l’agression armée est en effet implicite dès lors que le Conseil mentionne l’article 51, comme il le fait dans la résolution 661 (6 août 1990, Préambule). Cet article subordonne la légitime défense à l’existence d’une agression armée. B est à noter que la formule « armed attack », utilisée par l’article 51, est reprise par le texte anglais de la résolution 661, cependant que le texte français ne parle que d’« attaque armée ». L’expression « actes agressifs » n’est employée que par la résolution 67 (16 septembre 1990) à propos de violences iraqiennes contre certaines missions diplomatiques au Koweit.]]. Il n’a pas non plus utilisé les moyens d’action directe que lui offre la Charte mais s’est borné à une autorisation implicite d’action au profit des Etats membres. Cette prudence et ce détour contrastent avec la fermeté et l’implication directe du Conseil dans le rétablissement de la paix, après la fin de combats auxquels il est resté étranger. On ne saurait en effet oublier que la résolution 687 suit une action fondée sur une résolution précédente, la résolution 678, et que le caractère direct de son intervention contraste avec le caractère indirect de son implication sur la base de cette résolution. Il faut d’abord marquer cette opposition (A). Si cependant on observe plus largement le processus, la continuité et la logique d’ensemble sont frappantes (B). La résolution 687 n’en est pas moins singulière, constitue un moment clef et mérite d’être traitée comme un tout (C). A. – RÉSOLUTION 678 ET RÉSOLUTION 687: DE L’ACTION INDIRECTE A L’INTERVENTION DIRECTE La résolution 687 dérive de la résolution 678. En même temps, l’action entreprise sur cette base évoque un précédent, celui de l’affaire de Corée. Elle l’évoque matériellement en raison de la résistance à une invasion armée et du rôle décisif des Etats-Unis, animant et dominant une coalition militaire. Elle l’évoque aussi juridiquement, en dépit de notables particularités. Dans les deux cas, le Conseil s’est écarté des mécanismes formels tout en respectant et en appliquant la Charte. Mais la suite a été toute différente. La résolution 687 résulte de cette différence et la résume. Dans l’affaire de Corée, le Conseil avait recommandé aux membres d’apporter à la République de Corée « toute l’aide nécessaire pour repousser les assaillants » [[Résolution 83 (27 juin 1950), Roc. p. 5.]], puis demandé que les « forces militaires » fournies par les membres soient placées sous « un commandement unifié sous l’autorité des Etats-Unis d’Amérique », et autorisé ce commandement, désigné par les Etats Unis, à « utiliser à sa discrétion… le drapeau des Nations Unies en même temps que les drapeaux des diverses nations participantes » [[ Résolution 84 (7 juillet 1950), § 4 et 5, Rec. p. 6.]]. Puis, après avoir ainsi encadré directement un mécanisme de délégation de l’action militaire, le Conseil, en raison du retour de l’URSS en son sein, avait dû s’abstenir d’intervenir plus avant et notamment dans le règlement provisoire de la paix. Cet avortement avait durablement et négativement marqué les possibilités d’action du Conseil, accompagnant la paralysie du mécanisme de sécurité collective initialement organisé par la Charte. Dans l’affaire du Golfe, à l’inverse, le Conseil s’est tenu en retrait de l’ensemble de l’action militaire, n’en évoquant même pas ouvertement la possibilité. Il est en revanche au premier plan du rétablissement de la paix. Le contraste est cependant moins poussé qu’il n’y paraît. En 1991, pas davantage qu’en 1950, le Conseil n’a mis en oeuvre les dispositions pertinentes de la Charte relatives à son intervention militaire, mais il a procédé par défausse à partir d’une construction juridique. En se référant en 1950 à une « rupture de la paix » et à une « attaque armée » [[Ibidem, Préambule et § 1.]], sans formellement mentionner le Chapitre VII et en évitant le terme même d’agression, il a invité les membres à apporter leur concours à la République de Corée. En 1990, par la résolution 678, il a autorisé les membres « coopérant avec le Gouvernement du Koweit à utiliser tous les moyens nécessaires pour mettre en oeuvre la résolution 660 ». Sans entrer ici dans l’analyse des raisons [[Voir par exemple J. VERHOEVEN, A.F.D.I. 1990, préc. et «Les aspects juridiques… » Cedin, préc.]], tenant aux membres, tenant aux Nations Unies, qui ont expliqué, pour chaque cas, cette absence de recours aux dispositions spécifiques de la Charte prévoyant l’intervention directe du Conseil, on observera simplement que la formule choisie relève autant de la légitime défense collective, autorisée et canalisée par le Conseil, que du schéma idéal défini par la Charte. Il apparaît ainsi que la légitime défense, loin d’être un substitut de la sécurité collective, une alternative à son fonctionnement, ou une formule provisoire ou conservatoire en attendant son intervention, peut en être un complément, voire constituer l’une des modalités. Elle n’est au demeurant prévue par le Chapitre VII et peut dès lors s’inscrire dans sa cohérence [[Tel est bien le sens de la référence à l’article 51 dans la résolution 661, qui fait de la légitime défense collective une modalité de la sécurité collective.]]. On sait que les conditions d’action du Conseil ont suscité une controverse [[Voir sur ces divers points les aspects juridiques… préc. notamment p. 123-184. Egalement, la contribution de R. ZACKLIN, « Les Nations Unies et la crise du Golfe », ibid., p. 57-76.]]. Certains juristes, découvrant les vertus du formalisme et exégètes exigeants de la Charte, ont mis en cause la validité de la résolution 678 au regard de la Charte. Divers arguments ont été avancés à cet égard. D’abord, elle a été adoptée avec l’abstention d’un membre permanent, la Chine, contrairement au texte même de l’article 27 de la Charte. Ensuite, les opérations militaires ne répondent pas aux conditions de l’article 42, qui prévoit une action directe du Conseil. Dans le même esprit, le Comité d’état-major prévu par l’article 47 ne s’est pas réuni et le Conseil n’a pu dès lors contrôler les opérations. Ces opérations ont eu une ampleur qui dépassait les termes de l’autorisation donnée. Enfin et plus généralement, le Conseil a montré dans cette affaire un empressement et un souci tout à fait particulier qui contrastent avec sa passivité à l’égard d’autres situations comparables. Il aurait été à tous égards souhaitable que la Cour internationale de Justice soit saisie pour éclairer les Etats membres et le Conseil sur les exigences du droit, comme pour faciliter un règlement pacifique du différend entre l’Iraq et le Koweit. Ce dernier argument peut être rapidement écarté. Il a été d’abord formulé de façon imprécise, sans qu’on sache dans quel cadre la Cour aurait pu être saisie, cadre consultatif ou cadre contentieux, et par là même quelle question ou quel différend auraient pu lui être soumis. S’il s’agit d’une question posée à titre consultatif, par exemple sur les modalités d’action du Conseil, et dès lors qu’il a pris des décisions, on ne voit pas bien en quoi la Cour pourrait intervenir. Il n’avait pas lui-même de doute sur les modalités de son action. L’Assemblée générale aurait-elle pu la solliciter ? Il ne semble pas qu’elle ait compétence pour mettre en cause la manière dont le Conseil exerce sa compétence, surtout dans le cadre du Chapitre VII [[Cet argument, la compétence de l’Assemblée générale pour décider de la répartition des compétences entre les organes, est notamment utilisé par le représentant de Cuba lors de la discussion précédant l’adoption de la Résolution 687 – Procès-verbal, préc. p. 71.]]. S’il s’agit d’un différend, il est clair que l’occupation et l’annexion du Koweit ne constitue pas un différend entre deux Etats mais une situation qui intéresse la communauté internationale et le Conseil. Au surplus, comment l’Iraq accepterait-il la compétence de la Cour pour un différend avec un Etat dont il nie précisément la qualité étatique et même toute existence juridique ? Ces procédures n’auraient donc eu qu’un caractère dilatoire ou même dérisoire. Si l’on revient maintenant aux conditions du vote de la résolution 678, on rappellera simplement que la Cour internationale a précisément reconnu que la pratique constante du Conseil en la matière, distinguant l’abstention du veto, était juridiquement consolidée [[Conséquences juridiques pour les Etats de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie (Sud-Ouest africain) nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité, avis consultatif, C.I.J. ]Recueil 1971, p. 16. Au § 22, la Cour relève que cette procédure… « a été généralement acceptée par les Membres des Nations Unies et constitue la preuve d’une pratique générale de l’Organisation » (p. 22).]]. La Chine elle-même, en votant en faveur de la résolution 687, a confirmé ce point de vue. La même observation vaut à l’égard des autres objections. L’autorisation donnée par le Conseil évoque également le précédent de l’affaire de Corée, qui vient d’être rappelé. On y ajoutera un autre précédent dans l’affaire rhodésienne, où le Conseil a, par sa résolution 220 (1966) [[Résolution du 9 avril 1966, par laquelle le Conseil « habilite le Royaume-Uni » à se saisir « au besoin par la force – d’un navire violant l’embargo imposé.]], autorisé expressément le Royaume-Uni à employer la force pour empêcher une violation de l’embargo qu’il avait décidé sur la base du Chapitre VII. Certes, l’autorisation n’avait ni le même objet, ni la même ampleur, mais la situation est juridiquement comparable. Quant au problème de la proportionnalité des moyens mis en oeuvre, ils relèvent d’une appréciation purement militaire à laquelle le Conseil n’a pas souhaité se livrer, même si le Secrétaire général a ultérieurement regretté que les termes très larges de son autorisation ne permettent pas de le faire [[Conférence du 19 avril 1991 devant le Parlement européen; Conférence du 22 avril à l’Université de Bordeaux. Voir S. Sur «La conduite des hostilités et les aspects militaires du conflit », in Les aspects juridiques…, préc. p. 207-225.]]. S’agissant enfin du caractère discriminatoire de l’intervention du Conseil, on peut rappeler, même s’il faut le déplorer, que la Charte ne garantit pas une égalité de traitement des Etats ni même des situations sur la base de critères matériels. Il appartient au Conseil d’apprécier discrétionnairement [[On pourrait, en la matière, appliquer par analogie le raisonnement suivi par la Cour dans l’Admission d’un Etat aux Nations Unies (Charte, art. 4) avis consultatif C.L.J. Recueil 1948 p. 57. La Cour y constate le pouvoir « d’appréciation discrétionnaire des circonstances de fait », comportant tout « élément politique pertinent » (p. 63), du Conseil de sécurité dans l’exercice de ses responsabilités.]] si une situation donnée constitue une menace ou une rupture de la paix qui justifie une action, et quelles sont les modalités de cette action. En d’autres termes, la Charte institue au profit du Conseil un Etat de police et ne crée pas un Etat de droit [[La notion d’Etat de droit a acquis récemment une grande popularité, et ses définitions doctrinales sont multiples. On entendra ici la situation dans laquelle l’action de toute autorité publique est soumise à des règles juridiques d’habilitation et peut être contrôlée par un organe indépendant sur la base des termes de cette habilitation.]]. Les objections présentées par certains juristes méritent donc d’être requalifiées et situées dans leur véritable contexte, qui est politique. Diverses sensibilités se manifestent à cet égard. On peut ainsi exprimer une certaine sympathie à l’égard de l’Iraq, et plus encore de l’antipathie à l’égard du Koweit, soit en raison de son existence même, soit en raison de son régime ou de sa richesse. Mais cette variante du combat anti-impérialiste a été abandonnée par l’URSS elle-même, laissant orphelins ses compagnons de route. On peut encore, pour des raisons de principe, rejeter l’idée que de la guerre puisse sortir une solution juste, et estimer que le remède est pire que le mal. C’est alors contester la sécurité collective et les bases mêmes de la Charte, qui repose sur la possibilité d’utiliser la force armée contre un Etat qui viole la Charte. On peut, plus subtilement, soutenir que les mesures déjà adoptées, embargo et blocus, devaient suffire et qu’il fallait leur laisser le temps de prouver leur efficacité. Lorsqu’on constate que, plusieurs mais après la fin des combats et en dépit de leur maintien, l’Iraq est encore en mesure de résister à l’application pleine et entière de la résolution 687 elle-même, on peut avoir des doutes sérieux sur ce point. Quant à la proportionnalité des opérations militaires, elle repose sur l’appréciation des belligérants et on ne saurait s’étonner qu’ils s’attachent avant tout à préserver la vie de leurs propres troupes. On peut enfin déplorer l’instrumentalisation du Conseil au profit des Etats-Unis et le déséquilibre ainsi créé au sein même du Conseil. On reviendra sur ce point (infra, B). Mais il est dans la logique même de la Charte, qui désigne individuellement et nommément les membres permanents, d’associer l’intérêt collectif à leur intérêt individuel. La discussion pourrait être indéfiniment poursuivie, et ne saurait sans doute pas être complètement réglée sur des bases purement juridiques. Il est à la fois inévitable et légitime que les appréciations des uns et des autres soient tributaires de leur sensibilité politique. Mais, sur le plan juridique, le Conseil est en dernière analyse maître de ses qualifications et de son action et on ne voit pas d’argument qui puisse convaincre qu’il ait en l’occurrence outrepassé la Charte. On pourrait plus justement lui reprocher de l’avoir méconnue par défaut dans d’autres situations que de l’avoir appliquée en l’espèce et il est paradoxal de lui reprocher son efficacité [[Comme le fait, en substance, le représentant de Cuba lors de la discussion précitée, lorsqu’il critique la « sélectivité curieuse du Conseil », Procès-verbal, p. 615.]]. B. – LA RÉSOLUTION 687 ET L’ACTION D’ENSEMBLE DU CONSEIL DE SÉCURITÉ DANS L’AFFAIRE DU GOLFE La résolution 687 s’inscrit à divers titres dans la continuité de l’action du Conseil. – Elle prolonge d’abord, en s’adaptant à la situation qui résulte des opérations militaires, les résolutions précédentes. Celles-ci réalisent une gradation organisée de mesures, de la condamnation de l’occupation du Koweit et de l’ensemble des conséquences qui en sont résultées, en passant par les déclarations d’invalidité des mesures prises par l’Iraq, les demandes ou exigences de retrait, puis les mesures coercitives d’embargo et de blocus, précédant l’autorisation implicite du recours à la force [[Treize résolutions ont été adoptées, de la résolution 660 (août 1990) à la résolution 686 (2 mars 1991), avant la résolution 687.]]. Elle sert également de base à l’adoption de mesures subséquentes pour son application et son respect, et l’action du Conseil nes’épuisepas avec elle [[Voir infra,III.]]. Ilnes’agitcertespasdela première application du Chapitre VII, ni même du premier recours à la force autorisé par le Conseil. Mais il est clair que l’ensemble,parsa continuité, son ampleur et sa diversité, est sans précédent et même sans exemple.Il contraste fortement à la fois avec le caractère ponctuel de certaines interventions du Conseil et avec le caractère vainement répétitif d’autres. Il était en effet fréquent que soient adoptées des résolutions répétitives qui ne pouvaient dissimuler la stagnation et l’impuissance du Conseil, sorte de bégaiement ou de gesticulation rhétorique sans effet sur les situations qu’elles visaient, postures plus que mesures. En l’occurrence, au contraire, la progression dosée, la pression croissante ont maintenu et jusqu’au bout explicité l’alternative claire offerte à l’Iraq : ou respecter les demandes du Conseil en évacuant le Koweit ou s’exposer à subir les conséquences d’un comportement contraire à la Charte. Cette logique du garrot, qu’il était à tout moment loisible à l’Iraq de desserrer, traduit une gestion méthodique de l’affaire, une politique du Conseil qui contraste avec les positions purement symboliques ou déclaratoires qu’il n’a été que trop souvent contraint d’adopter pour faire semblant d’agir et tenter de dissimuler les oppositions de fond entre membres permanents. – La continuité résulte ensuite d’une commune impulsion directrice. Il s’agit d’une considération de fait mais elle est déterminante pour l’ensemble des résolutions. On y trouve une main unique, ou quasiment, on y discerne une plume dominante, main ferme, plume autoritaire, qui sont celles des Etats-Unis. La conduite de l’affaire a été de bout en bout assurée par la volonté de l’administration américaine. Elle a reposé sur une instrumentalisation du Conseil dé sécurité.
Il a au ou dû, avec la résolution 678, laisser le terrain libre à la coalition animée par les Etats-Unis et constituée autour d’eux. Cette formule a entraîné un abandon complet à leur profit de la conception, de la gestion et du contrôle de l’intervention militaire, ce qui convenait aux Etats-Unis. Ils étaient en effet peu disposés à accepter une direction collégiale, et surtout au profit d’un Comité d’état-major [[La résolution 665 (25 août 1990) a cependant demandé aux Etats de « coordonner les actions qu’ils prendront … en faisant appel en tant que de besoin aux mécanismes du Comité d’état-major… » (§ 4), sans être suivie d’effet, malgré certains souhaits exprimés par l’Union Soviétique.]] où siègent des Etats qui n’avaient pas de troupes sur place, et spécialement l’Union Soviétique. Peut-on, en outre, sur le plan militaire, croire à l’efficacité d’une telle direction collégiale, au maintien de la cohérence et du secret qu’elle implique? Au surplus, ne pas doter les troupes de la coalitiondu pavillon des Nations Unies leur donnait une plus grande liberté sur le plan de l’utilisation des méthodes et moyens de combat, les troupes des Nations Unies pouvant être plus rigoureusement soumises au respect de l’ensemble des règles relevant du droit des conflits armés et du droit humanitaire. A tout le moins, certaines controverses auraient pu naître sur ce point [[Voir Ph. BRETTON, A.F.D.I. 1991, préc.]].
En revanche, s’agissant du retour à la paix, des conditions de son rétablissement et de son maintien, il paraissait plus efficace de s’appuyer sur un mandat international complet et précis, ainsi que de mettre en oeuvre les moyens institutionnels et opérationnels offerts par le système des Nations Unies. Une base incontestable est ainsi fournie à l’action, qui est conduite par des agents internationaux et placés sous l’autorité du Conseil. La différence s’explique par des considérations d’opportunité qui ont relevé de l’appréciation des membres permanents.
Cette observation ne conduit pas nécessairement à critiquer les modalités d’intervention des Nations Unies. C’est en effet la logique de la Charte et surtout celle du Conseil de sécurité de faire des Etats membres les premiers garants de son application. En toute hypothèse, le Conseil ne dispose pas de moyens militaires qui lui soient propres [[On sait que la Charte ne prévoit pas que le Conseil dispose de forces internationales préalablement constituées, mais seulement la mise à disposition de forces nationales (art. 45), sur la base d’accords spéciaux (art. 43), qui en pratique n’ont pu être conclus jusqu’à présent.]] et doit utiliser ceux des membres, même sous le contrôle d’un comité d’état major au demeurant constitué par les représentants des membres permanents. La considération que les Etats membres utilisent le Conseil tout en se mettant à son service est conforme à la Charte. Celle-ci en effet ne désigne pas les membres permanents à partir de critères objectifs, anonymes ou abstraits, qui renforceraient leur caractère d’organes internationaux. Ils sont individuellement et spécialement dénommés et par là personnellement responsables de l’action du Conseil: dédoublement fonctionnel, avec toute l’ambiguïté qu’il comporte. Le Conseil est leur instrument mais ils sont en même temps l’instrument du Conseil, et au bout du compte on ne sait plus qui utilise qui [[Ce dédoublement fonctionnel est dans l’esprit du Préambule de la Charte, lorsqu’il indique que… « il ne sera pas fait usage de la force des armes, sauf dans l’intérêt commun ». Le nombre et la diversité des Etats ayant participé à la coalition militaire est bien un gage de l’existence d’un intérêt commun.]].
Les Etats-Unis sont autant l’instrument de la mise en oeuvre de la Charte que le Conseil le bras séculier de la politique américaine. En effet, à l’ensemble des membres permanents il faut largement substituer en l’occurrence les Etats-Unis, et cette monopolarité est plus singulière. Non qu’il faille réduire à rien le rôle des autres. La France a ainsi contribué à intégrer clairement l’action dans le cadre onusien, rejetant 1’unilatéralisme pur et soulignant les limites de l’intervention. La France a pu également obtenir l’adoption de la résolution 688, pour la protection des populations kurdes d’Iraq. Mais l’influence prépondérante des Etats-Unis demeure. Est-il exagéré d’en conclure que le Conseil ne peut remplir son rôle que s’il est animé par une impulsion dominante et unique ? Son efficacité serait alors incompatible non seulement avec sa division, ce qui va de soi, mais aussi avec le compromis en son sein. On l’avait déjà constaté au moment du déclenchement de l’action en Corée en 1950. Dans l’affaire du Golfe, c’est le ralliement de l’URSS et le relatif effacement de la Chine qui ont permis l’ensemble du processus.
Outre la situation politique générale, est probablement intervenue dans cette attitude complaisante ou modeste une double considération. D’abord, les Etats-Unis auraient agi en toute hypothèse et recouru à la légitime défense collective, privant les Nations Unies d’une occasion de démontrer leur utilité, au détriment de l’Organisation et de la Charte. Ensuite, ainsi rejetés dans 1’unilatéralisme, les Etats-Unis auraient attaché moins de prix au partenariat avec l’URSS dans d’autres domaines, et notamment au Proche-Orient. Quant à la Chine, elle n’avait dans ce contexte aucun avantage à apparaître comme un bouclier diplomatique de l’Iraq, Etat agresseur et proliférant. A des titres divers, ces Etats étaient en quête de responsabilité et ou respectabilité internationales, que le soutien symbolique aux Nations Unies leur procurait à un prix peu élevé. Pour les autres membres permanents, France et Royaume-Uni, l’occasion de participer militairement à l’opération valorisait leur rôle au sein du Conseil et légitimait leur prérogative. C. – LA SINGULARITÉ DE LA RÉSOLUTION 687 Parallèlement à cette continuité, la résolution 687 constitue un moment de rupture avec celles qui précédent. – Elle obéit d’abord à une logique de rétablissement et de garantie de la paix, et non plus à une gradation coercitive culminant avec le recours à la force. Les mesures qu’elle comporte n’en sont pas moins contraignantes. Leur caractère coercitif à l’encontre de l’Iraq est même nettement plus marqué. Leur efficacité est en même temps plus grande parce qu’elles s’appuient sur une situation de fait qui a été bouleversée. On observera cependant que, à la différence des précédentes, elle requiert l’assentiment formel de l’Iraq, donnée qui doit être relevée et expliquée (infra, II A). – Dans son objet, la résolution se déploie sur divers plans. Elle n’apparaît pas comme une pièce isolée d’un processus, mais comme un tout homogène et complet. Elle peut être lue isolément et traite de façon compréhensive des problèmes de retour à la paix. Elle constitue également une matrice pour des résolutions et instruments postérieurs, qui doivent se développer dans le temps. Elle n’est pas seulement un ensemble normatif, mais un mécanisme de production d’institutions subordonnées et d’actions programmées. A cet égard elle repose sur une logique administrative ou bureaucratique, directement inspirée par une logique exécutive d’Etat dont elle est la traduction. Jamais le Conseil n’a été doté d’un système d’application aussi étendu et précis, constitué sur ses propres bases, avec le minimum de références directes à la Charte, mais exploitant diverses institutions et instruments internationaux extérieurs, associés, assemblés et projetés dans l’action par une impulsion unique. Une sorte d’opportunisme combinatoire rapproche et utilise traités, institutions en fonction de ses propres exigences afin de déployer obligations et mesures coercitives contre l’Iraq. La productivité juridique et opérationnelle des Nations Unies, et surtout du Conseil, est ainsi affirmée par l’exemple. On peut tout faire avec l’Organisation à condition de vouloir et de savoir l’utiliser. Constatation qui permet de relativiser le thème récurrent de la révision de la Charte, y compris pour la composition ou les modalités du vote au sein du Conseil. Il est en effet en mesure d’appliquer et de faire respecter la Charte, pourvu que les bases politiques posées par les fondateurs existent, bases politiques auxquelles aucune réforme juridique ne saurait suppléer [[Voir J. VERHOEVEN, A.F.D.I., 1990 préc. Spéc. p. 189-194.]]. – Dans ses modalités enfin, la résolution 687 associe action directe du Conseil, action par l’entremise d’institutions existantes, création d’organes subsidiaires, utilisation des organes des Nations Unies et notamment du Secrétaire général et du Secrétariat. En revanche la mise à l’écart de l’Assemblée générale est complète. Il ne lui est rien demandé et aucune de ses résolutions n’est citée, contrairement à une pratique fréquente du Conseil [[Y compris dans l’affaire de Corée, avec les résolutions 82 (25 juin 1950), dans laquelle le Conseil se réfère à diverses résolutions de l’Assemblée générale (Préambule) et 85 (31 juillet 1950) dans laquelle il demande le concours des autres organes principaux (§ 4).]], ce qui témoigne d’un nouvel équilibre entre les organes. La résolution 687, moment clef de l’action du Conseil, en change en même temps la nature. Il est désormais au contre des opérations, il en maîtrise l’orientation et le déroulement, et l’ensemble du processus est clairement placé sous son autorité. L’objet du présent commentaire se concentrera sur les questions qui sont directement liées au rétablissement et au maintien de la paix, c’est-à-dire à celles qui comportent un aspect politique et militaire – consolidation de la frontière, désarmement de l’Iraq, maintien des mesures coercitives – à l’exclusion des questions humanitaires, des problèmes de responsabilité ou des modalités de financement des opérations [[Sur ces points, voir. G. COTTEREAU, infra.
]]. On s’attachera donc particulièrement aux éléments correspondants du Préambule, ainsi qu’aux sections A à C, P, H et 1. Les sections A et C, respectivement consacrées à la frontière Iraq-Koweit et aux mesures de désarmement de l’Iraq, occupent une position centrale. Ces dernières surtout impliquent une série d’opérations complexes et de longue haleine. Au-delà d’un dispositif normatif et institutionnel, elles comportent un difficile processus de mise en oeuvre. – Lire la suite