Introduction. D’une crise à l’autre

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L’année 2011 a été une année charnière à bien des égards, par les crises de société et de gouvernement qu’elle a connues (dans le monde arabe, notamment), par la fin d’une période consacrée à une certaine conception de la lutte contre le terrorisme et à laquelle le dixième anniversaire des attentats du 11 septembre semble avoir mis fin, par la réapparition ou la consécration de fractures territoriales (comme avec l’avènement du 193e Etat membre des Nations Unies, le Soudan du Sud). L’année 2011 a entériné les changements que l’année précédente avait initiés dans les pays du monde arabe en révolte (Tunisie, Yémen), en Côte d’Ivoire (avec l’intronisation d’un nouveau Président de la République, Alassane Ouattara) ; elle en a aussi provoqué d’autres, en Egypte, en Libye, en Syrie et en Iraq (après le départ des derniers soldats américains de l’opération Iraqi Freedom). Dans ces pays, l’année 2011 finit sur plus d’incertitudes que jamais : quelle stabilité à venir pour ces quatre pays-clefs du « Grand Moyen-Orient » ?

En cette fin d’année 2011, qui a donc connu bien des crises internatio- nales et de société, nous avons choisi de revenir sur la crise d’un pays (le Kirghizstan) et d’une région (la vallée du Ferghana et, plus généralement, l’Asie centrale) peu connus et d’analyser les tenants d’une possible crise à venir sur la péninsule coréenne, région-clef pour la stabilité asiatique, voire internationale.

Sébastien Peyrouse revient sur les événements de 2010 au Kirghizstan, une crise qui « synthétise à elle seule nombre de difficultés auxquelles l’ensemble de la région [la vallée de la Ferghana, à cheval sur trois Etats, Ouzbékistan, Kirghizstan et Tadjikistan] est confronté : pauvreté rurale et chômage, tensions interethniques, commerce illégal, trafic de drogue, développement de l’islamisme ». Ces difficultés ont été exacerbées par des problèmes de frontières entre ces pays et le développement des trafics illégaux qui s’y déroulent. Selon lui, ces événements « n’ont fait que confirmer la difficulté à trouver une solution rapide et de long terme au risque d’instabilité et la diversité des défis auxquelles les sociétés centre-asiatiques doivent faire face ».

Marianne Péron-Doise tente de nous montrer que les autorités nord-coréennes ne sont pas si imperméables qu’on pourrait le penser au monde qui les entoure et observent avec la plus grande attention les soubresauts du monde arabe. Selon elle, « l’observation des révoltes arabes et de la crise syrienne ne tend qu’à renforcer la mentalité de ‘citadelle assiégée’ du régime nord-coréen et son sentiment d’insécurité récurrent, tout en le confortant dangereusement dans sa perception que la possession de l’arme nucléaire est seule à même d’assurer sa survie ». Au-delà, Marianne Péron-Doise analyse les incertitudes de la péninsule coréenne, celles créées par les crises successives liées aux essais nucléaires nord-coréens de 2006 et 2009 et à plusieurs attaques contre le voisin sud-coréen, mais également celles liées à la mort du « Cher leader » nord-coréen, Kim Jong-il, le 17 décembre 2011, et à la nature de ce régime totalitaire. Elle considère que « l’accumulation d’incertitudes (politique, économique et nucléaire) fait de plus en plus pencher en faveur de l’option du délitement, progressif ou soudain ».