Si l’année 2011 a été une année charnière à bien des égards, par les crises de société et de gouvernement qu’elle a connues (dans le monde arabe, notamment), l’année 2012 a été celle de la crise, financière en premier lieu. L’Europe et la zone euro ont continué de s’enfoncer dans la crise. Une guerre a été évitée de justesse entre le Soudan et le Sud-Soudan au sujet de leur frontière commune. Et le reste du monde n’a pas été plus stable, avec l’émergence de deux grands espaces de crise majeure et durable, la zone sahélienne et la Syrie et ses environs – en particulier le Liban, dont beaucoup craignent une nouvelle déstabilisation –, qui continueront à se développer en 2013.
Aux origines de la crise sahélienne se trouvent la crise libyenne et l’intervention internationale pour « libérer » la Libye de son despote. Comme toute intervention extérieure, l’opération militaire de l’OTAN a eu des conséquences non prévues. Elle a contribué à accentuer la dispersion des armes et la fragmentation de l’Etat, alors même que, pour des observateurs non experts, « le taux élevé de participation aux premières élections démocratiques de l’histoire libyenne en juillet 2012 a pu être interprété comme un référendum consacrant l’unité nationale ». Laurence Ammour, chercheur associée à l’Institut d’études politiques de Bordeaux, revient sur le cas libyen, pays du « Printemps arabe », où « l’effondrement de l’Etat a été le plus flagrant ». Elle nous démontre par le menu comment « l’absence de Constitution, l’hétérogénéité et la désunion de l’opposition, la faiblesse des structures d’Etat, ainsi que la persistance d’unités armées plus ou moins autonomes responsables de nombreux abus de pouvoir, accentuent la fragmentation du pays ».
La Syrie est passée d’une crise de régime à une guerre civile sanglante qui, à ce jour, a fait, selon les dernières estimations publiées par le Haut Commissariat aux droits de l’homme des Nations Unies, au moins 60 000 morts. Elle est en train de progressivement rebattre toutes les cartes politiques de la région, alors que le régime syrien s’était, au cours de ces dernières années, rendu indispensable à un certains nombres d’acteurs de cette région : le Hezbollah bien sûr, mais aussi l’Iran. C’est sur ce pays que nous avons voulu porter un second éclairage cette année pour expliquer son positionnement et sa politique au regard des changements induits par le « Printemps arabe », mais aussi des constantes de sa politique étrangère et de sa relation avec son ennemi le plus fascinant, les Etats-Unis. Louis Racine, doctorant au Centre d’analyse et d’intervention sociologique (EHESS), pose la question de savoir si l’Iran est en train de « nouer un dialogue direct avec les Etats-Unis », alors même que le contexte n’est pas des plus favorables pour le régime de Mahmoud Ahmadinejad – Président qui devra céder sa place en juin 2013, après des élections générales auxquelles il ne pourra se présenter. L’Iran arrivera-t-il à renouer ce dialogue après des années de méfiance réciproque ? En analysant les jeux de pouvoir au sein de cet Etat clérical, Louis Racine pose ainsi la question de savoir si ces élections à venir « seront, pour le régime, l’occasion de présenter un nouveau visage ».