Alors que Donald Trump a fait du « retour de la compétition entre grandes puissances » un élément structurant de la stratégie internationale des Etats-Unis, cet article s’attache à comprendre et mieux définir la temporalité et les processus ayant conduit à une telle évolution. Dans cette perspective, il souhaite dépasser une conception positiviste de la stratégie internationale des Etats-Unis pour l’appréhender comme construction sociale. Aussi interroge-t-il les représentations ainsi que les rapports de forces politiques traversant le processus de décision. Alors que la fin de la Guerre froide a vu disparaître la puissance rivale soviétique, l’émergence des concepts de « fin de l’histoire » et d’« unipolarité » a mené à une quasi-disparition de l’idée de compétition stratégique. Ce moment particulier a poussé au renforcement des outils normatifs de la stratégie américaine afin d’intégrer les anciennes puissances rivales à un « nouvel ordre mondial ». Pourtant, les résistances émergeant au cours des années 2000 entraînèrent une période de questionnements qui aboutit à l’adoption d’une politique d’engagement des puissances rivales plus réaliste au cours du second mandat de George W. Bush et de la présidence de Barack Obama. La stratégie de « paix armée » de l’administration actuelle parachève ainsi l’évolution initiée ces dernières années, mettant fin au moment post- Guerre froide de la politique étrangère américaine.